MADEMOISELLE JULIE Mademoiselle Julie est l'une des pièces
d'August Strindberg parmi les plus complexes dans l'approche psychologique
des personnages, chargés d'ambiguïté et d'hésitations.
Le drame qui va lier Julie, l'aristocrate, et Jean le domestique de
son père, ne se résout pas dans la seule analyse sociale.
A l'opposition de classes se mêle celle des sexes et, plus profonde
encore celle que chacun se livre à lui-même dans la contradiction
de ses désirs. Lorsqu'au bout de ce rapport de répulsion-attirance,
domination-soumission, haine-fascination qui les lie, les deux protagonistes
succombent enfin à leur désir, c'est l'échec. L'incompréhension
qui les sépare, leur incapacité à démêler
la nature des leurs sentiments, les éloignent irrémédiablement.
Dans la cuisine, qui est le théâtre de cette "tragédie
naturaliste" (comme la sous-titre Strindberg), l'auteur se livre à
une analyse des êtres qui interroge sans donner de réponse.
Le spectateur ne s'en sort pas avec des conclusions manichéennes :
le pouvoir peut changer de mains et celui qui opprime le fait parfois
avec d'autres armes que celles que l'on croit voir. L'adaptation française
est de Boris Vian.
Les représentations ont eu lieu au Théatre Edouard VII
(Paris), du 20 septembre au 3 novembre 1983 (interruption pour cause
de maladie et d'hospitalisation d'Isabelle Adjani).
AUGUST STRINBERG De nationalité suédoise, il est né à Stockholm, en 1849, et mort en 1912. Il commença des études de mèdecine à l'université d'Uppsala, mais fut bientôt attiré par le métier de comédien. Ses débuts furent peu propices, et, devant renoncer à jouer des pièces, il se mit à en ecrire. En septembre 1870, le Théâtre Royal de Stockholm donna son acte A Rome, et en l872 il acheva son premier chef-d'oeuvre, Maître Olof. Pour sa première femme, actrice débutante, il composa ses deux drames "mediévaux", Le Secret de la Guilde (1880) et La Femme de Sire Bengt (1882). Ayant publié en 1879 son premier roman, La Chambre rouge, il se mit à analyser les relations maritales dans une série de nouvelles, Les Mariés (1884). puis coup sur coup en 1887-1888, il écrivit les cruelles confidences dramatiques qu'il est convenu d'appeler ses drames naturalistes : Père, Mademoiselle Julie, Les Créanciers. Antoine admira la première pièce, et promit de l'inscrire au programme du Théâtre Libre, mais c'est finalement Lugné-Poe qui la monta, en décembre 1894, après avoir donné Les Créanciers. En janvier 1893, le Théâtre Libre avait joué Mademoiselle Julie. Après son divorce, Strindberg voyagea pendant quelques années, puis traversa la grande crise physique et psychologique dont il retraça le déroulement dans Inferno (1897). Il composa en 1898 la trilogie du Chemin de Damas, que suivirent La Danse de mort (1900) et Le Songe, (1901). Il créa en 1902, à Stockholm, le Théâtre Intime, salle d'essai qui fut peut-être le berceau de l'expressionnisme, et où fut jouée, entre autres, La Sonate des fantômes (1908). Grand admirateur des romans de Zola, Strindberg fut fortement influencé par le drame tiré de Thérèse Raquin. Il envoya au romancier, en 1887, le manuscrit de sa propre traduction française de Père, et en 1892 il proposa à son éditeur de traduire en suédois La Faute de l'abbé Mouret.
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