BIOGRAPHIE D'ALICE JAMES
Alice James est née à New York (USA) en 1850,
et décèda à Londres (GB) en 1892. Elle
est la soeur de Henri et William James, deux autres écrivains
fort célèbres.
Dans une lettre écrite à une de ses nièces,
Henry James dit : "Dans notre famille, les filles semblent
n'avoir que des perspectives très limitées".La
vie d'Alice James témoigne de cette déclaration
d'Henry. En 1853, trois ans après la naissance d'Alice à New
York, Henry James Sr avait écrit dans un article au "Mouvement
de la Femme" : "La vertu même de la femme la disqualifie
pour toute dignité didactique. L'étude et la
sagesse ne sont pas faites pour elle."
La jeunesse d'Alice, comme celle de ses frères, a été marquée
par le déracinement. La famille James voyage beaucoup
entre l'Europe et l'Amérique. Les garçons,
s'ils changent d'école fréquemment, reçoivent
néanmoins une éducation assez formelle et organisée.
Le cas d'Alice est différent. En Amérique elle
a fréquenté plusieurs écoles privées
pour jeunes filles, mais l'éducation reçue
relevait davantage de "l'accomplissement féminin" que
de l'étude universitaire réelle. En Europe
elle n'a suivi aucune école du tout, reçoit
une vague instruction en français et en mathématiques
par des gouvernantes, mais rien de cohérent et rien
qui la préparerait à une vie indépendante
loin de sa famille.
La plus jeune des cinq enfants James, Alice ne s'est jamais
mariée et a vécu avec ses parents jusqu'à leur
mort, hormis quelques mois en 1882. Après le décès
de leurs parents, Henry a assumé la responsabilité de
sa soeur, veillant à ses finances et aux soins médicaux.
A cette époque, Alice avait déjà souffert
de deux dépressions nerveuses et physiques majeures,
qui allaient se reproduire plusieurs fois. L'histoire médicale
d'Alice James se lit comme un livre élémentaire
sur les traitements psychiatriques de l'époque victorienne.
On l'envoie à New-York en 1866 pour "exercice thérapeutique",
dans le Massachusetts en 1883 pour une cure de sommeil, et à nouveau à New-York
en 1884 pour y subir des électrochocs.
Fin 1884, Alice part en Angleterre avec son amie et infirmière,
Catherine Peabody Loring, croyant qu'un changement de décor
et d'atmosphère améliorerait sa santé.
Pendant les huit années suivantes, jusqu'à sa
mort due à un cancer du sein, elle a souffert d'accès
diagnostiqués comme hystériques, d'écroulement
systémique nerveux et physique. Maladie dont on disait
encore au 19ème siècle qu'elle était
exclusivement féminine, jusqu'à ce qu'on l'observe
aussi chez les hommes, notamment les soldats ayant subi les
horreurs de la Première Guerre Mondiale.
Quelques féministes ont argué que l'hystérie
pouvait être une résultante de la castration
psychique de la femme, au nom de la bienséance et
de la féminité. Alice James avait certainement
saisi cela, elle qui était cloîtrée chez
elle par un père qui lui interdisait toute stimulation
intellectuelle. Elle avait compris que ses dépressions
n'étaient que la conséquence de la colère
et de la frustration refoulée.
Alice a un peu participé à la vie de La Nouvelle
Angleterre. Jeune fille, elle a cousu des bandages pour la
Newport Women's Aid Society pendant les deux premières
années de la guerre civile. En 1868, elle a rejoint
la Female Humane Society of Cambridge avec sa mère.
Cinq ans plus tard, elle s'est engagée pour trois
ans comme professeur d'histoire pour la Society to Encourage
Studies at Home, un cours par correspondance national pour
des femmes basées à Boston. Mais dans sa propre
correspondance, elle a tendance à minimiser l'importance
de ce travail, se concentrant au lieu de cela sur son échec
matrimonial.
Si Alice James a vécu une existence en grande partie
privée et limitée, elle est devenue une icône
féministe suite à la publication de son journal à titre
posthume. Pendant des années, Alice avait été l'objet
de l'incompréhension totale de sa famille. Ses dépressions
n'avaient fait qu'accentuer le malaise, et son frère,
le psychologue William James, ne la considérait que
comme une "collection de symptômes" à étudier
plutôt que comme un être humain.
En 1889 à Londres, elle commence à tenir un
journal, dans lequel elle consigne la compréhension
qu'elle a d'elle-même. Dans la recherche de la liberté par
l'écriture, comme son père et deux de ses frères
avant elle, Alice a finalement trouvé ses propres
mots et sa propre voix pour raconter sa propre histoire.
Alice est morte à Londres d'un cancer du sein en 1892.
Elle a confié le journal, pour publication posthume, à Catherine
Loring. Henry James craignant que celui-ci - avec des noms
reconnaissables - mette en danger sa propre position sociale
et ses avantages s'il était édité, l'interdit.
Il est finalement publié en 1934 (18 ans après
la mort d'Henry) comme une sorte d'hommage à Garth
Wilkinson et James Robertson, "les oubliés" des frères
James, par la fille de Robertson, Marie James Vaux, qui l'a
appelé "Alice James : Ses Frères - Son Journal".
Mais le journal avait été dénaturé par
de nombreuses censures éditoriales, et ce n'est qu'en
1964 que Léon Edel, biographe d'Henry James, en publie
une version reconstituée et complète, basée
sur la transcription de Catherine Loring.
LECTURE PAR ISABELLE
ADJANI
Alice James est de ces femmes qui bouleversent Isabelle
: passionnée, opprimée par son époque
et son environnement, révoltée, avec une intelligence
vive et un regard acéré sur ses contemporains,
artiste, spirituelle. Elle n'est pas sans rappeler Camille
Claudel, à laquelle Isabelle consacrera
quelques années plus tard un de ses plus beaux films.
Cet enregistrement (extrait
Realaudio 2'16) date de 1983. Isabelle incarne
véritablement Alice, et nous fait partager les épisodes
les plus marquants de son Journal, qu'elle tiendra jusqu'à sa
mort, les dernières pages ayant été dictées à Catherine
Loring. La cassette, épuisée depuis de nombreuses
années, vient d'être rééditée
aux Editions
des Femmes.
L'éditeur publie aussi Le Journal d'Alice James,
préfacé par Léon Edel, et une biographie
d'Alice James par Jean Strouse.
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